Immigrer, une aventure déchirante

Immigrer et s’expatrier sont deux choses complètement différentes. Immigrer c’est s’établir dans un pays, s’expatrier c’est vivre dans un pays pour une durée définit. 

Nés en France entre 87 et 97, nous sommes la génération Erasmus, la génération « auberge espagnole ». Certains l’ont fait, d’autres l’ont vécu par procuration en voyant leurs camarades, assidus sur les bancs de la fac, obtenir une bourse étudiante pour partir étudier dans certaines villes sympas d’Europe. Just for fun, puis rentrer au bercail. Face A: l’expatriation.

Ensuite, la génération pvtistes est arrivée en masse ! Dans ses débuts, l’Australie a été victime du succès de ce fameux passeport vacances-tourismes, maintenant c’est au tour du Canada. Face B: l’immigration.

Ah le Canada ses vastes forêts étendues, ce beau manteau blanc qui recouvrent ses villes de l’Est du pays durant quasiment 6 mois de l’année, ce beau bûcheron canadien, avec sa chemise carottée (perso je le cherche encore)… Fort de son succès, en 2017, 11050 français, âgés entre 18 et 30 sont et vont arrivés au Canada.

Montréal et Toronto sont les deux grosses villes prisent d’assaut ! La première pour les frileux de l’anglais, ils préfèrent se réfugier dans la Belle Province, chez nos chers cousins les « québécoés mon esti ». Les autres, plus téméraires, et avident d’un vrai dépaysement linguistique optent pour le petit New-York, les grattes-ciels et la diversité culturelle.

And what about me ? rien à voir ! Ni PVT, ni la conquête de l’ouest, je prends juste un billet aller, un visa touriste et me voilà un 27 novembre 2014 (jour pour jour), pour le premier jour de neige de l’année, seule, avec ma valise cherchant le bus 747 qui m’emmènera de l’aéroport Trudeau à ma nouvelle coloc de… français. Pourquoi Montréal ? je ne savais pas trop, et je ne crois pas très bien savoir pourquoi encore aujourd’hui…

La chance du débutant me fait me concocter un petit nid douillet avec deux joyeux lurons, jumeaux, qui viennent des Yvelines. Jeune Essonnienne, je n’étais pas trop dépaysée. Si ce n’est par l’architectures très américaines, les feux tricolores, la sirène des pompiers et des policiers qui est très différente de chez nous en France.

L’autre point également qui est très différent de la région parisienne et qui pour le coup est vraiment très appéciable c’est le CIVISME. Qu’il est agréable de vivre dans un pays où les gens se respectent. Roman Frayssinet, jeune humoriste français ayant étudié et vécu à Montréal en parle mieux que moi ici bas:

Lorsque tu t’aventures dans un magasin, les employés te saluent comme s’il te connaissait. « Allo, ça va bien? »  « euh… ouais ça va merci… ». Ici les gens attendent le bus en ligne. Y a pas un troupeau de moutons devant les portes et tu peux ranger tes coudes pour pouvoir rentrer dans le métro. La fraude des transports ? c’est simple si tu vois quelqu’un sauter la petite rambarde, dis-toi que c’est un maudit français, et s’il porte une Canada Goose, alors sois-en sûr, c’était bel et bien un français voire un putain de parisien.

La première année, c’est l’année de tous les possibles.

Premier chalet d’hiver, avec spa inclus à l’intérieur et soirée digne du film Projet X. Gros son kain-ri, fumigènes, du monde partout dans le chalet, de l’alcool à foison et des drogues qui circulent à outrance, Jacuzzi, sauna… bref, grosse débauche.

Première soirée étudiante avec les footballeurs américains de Sherboorke: beaux minoux qui se lancent des balles à travers les pièces, d’autres qui se saoulent en jouant au bière-pong, un remake de American Pie hé hé.

Ton premier hiver rime donc avec découverte des joies et des activités hivernales, tu te risques au patin à glaces, tu fais ton premier igloofest, en mode VIP bien-sûr, open bar et réchaud à dispo. Puis le mois de mars arrive, tu vois les québécois partir dans le « sud », alors tu te la joues grande princesse et tu te prends un billet pour Cuba. Tes amis en France te jalousent comme jamais, mais c’est ça la vida au Canada.

Professionnellement aussi c’est l’année de tous les possibles. Les contacts pleuvent, les occasions aussi, tu trouves du travail rapidement, et tu le quittes aussi tôt car ici, le préavis est de deux semaines. Les opportunités pleuvent et en plus tu voyages, que demander de plus ? Tu fais alors ta demande de pvt.

La première année passe, et la seconde lui ressemble un peu avec moins d’euphorie. Tu commences à comprendre le mécanisme et puis tu te rends compte que Montréal c’est finalement très petit. Ta famille commence à te manquer. Tu te poses des questions. Est-ce qu’une expérience ou est-ce le début d’une immigration ?

Tu ne sais plus trop sur quel pied danser alors tu acceptes des petits jobs qui vont pas te donner la possibilité de te réaliser vraiment ici. En même temps tu te plains de ne pas trouver de stabilité… Tu envisages un premier retour en France, surtout pour déguster de bons vins et de bons fromages pas cher. Car les plateaux repas fromages vinos au Québec commencent à te couter un bras.

 

En France, les gens que tu as laissé sont quasiment tous au même point. Les mêmes tiennent toujours les mêmes blocs. Les copines rencontrent des petits mecs, mais rien de transcendant. Bref, eux n’ont pas quitté leur route et toi tu leur racontes toutes tes péripéties, tu as tout de suite l’impression que ta vie au Canada est certes instable mais 1000 fois plus trépidante. Ton visa toujours valide, tu repars. Le cercle vicieux commence à se mettre en marche.

Quand t’es au Canada tu vantes les mérites de la vie en France, quand t’es en France tu fais l’éloge de la vie au Canada.

Au final, ton visa approche à expiration et tu ne t’es pas encore activée à faire ta demande de résidence, les mois défilent et la liberté de choisir ou de partir, n’est plus. Ta seule alternative est de repartir dans ton pays, le temps et l’administration ne jouent plus en ta faveur pour éventuellement rester sur le territoire. Peut-être que c’est ce que tu attendais finalement, que la négligence des papiers pour rester au Canada, t’impose une décision. En fait cette négligence était inconsciente et c’est ton moi intérieur qui a fait le choix à ta place….

Oui, il est vrai qu’il reste des alternatives, mais me marier précipitamment avec un canadien pour faire mes papiers et rester ici, non merci ! Je suis bien trop attachée à mon indépendance et mon autonomie pour faire ça !

Pour ma part, je m’arrête au premier Klapish, « les poupées russes », je laisse ça aux autres !

Aux yeux de ceux et celles qui sont des deux côtés de l’Atlantique, tu ne sais juste clairement pas ce que tu veux. T’es une girouette, instable, qui change d’avis comme de chemises.


Mais ils ne se rendent pas compte comme c’est difficile de faire le choix de l’immigration. Faire sa résidence permanente et sa citoyenneté canadienne, relève pour moi d’une réflexion vraiment importante. Etant moi-même fille d’immigrés, ai-je envie de faire vivre à mes parents et à moi-même ce qu’ils ont vécu. Vivre loin des siens, voir son neveu grandir et ses parents vieillir à vu d’oeil sans être auprès d’eux ? Non, définitivement, non. C’est décidé, après trois ans de vie canadienne, je rentre à la maison…

Et du coup, tu postules un peu pour ton retour ? Ouais, j’ai déjà postulé au Portugal, en Espagne et même au Maroc…

Mais tu voulais pas rentrer France à la base ? Bah ça va au pire je serais à 2H30 de vol de Paris…

On ne peut pas aller à l’encontre de sa nature vagabonde.

Buh Bye pays de Ryan !

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